Page 12 - Adec-Bulletin 03-2004
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Bulletin de l’Association “Les Amis de Comiac” (ADEC) Numéro 3 - 2004 - Page 12
Le bagne
De tous cotés les arbres tombent à coup de
hache. Ce travail terminé on attaqua à
coup de mines les rochers, puis on procéda
au nivellement du plateau, après quoi au
débarquement des cases construites en
France et dont les pièces sont numérotées,
enfin à leur établissement.
Ce travail énorme presque surhumain s’é-
tait accompli en 15 jours. Mais ce travail
forcené sous un soleil de plomb ou des
pluies diluviennes amenèrent bientôt les
maladies.
Les officiers de santé aidés de quelques
transportés valides commencent leur servi-
ce, les Sœurs Hospitalières n’ayant pas en-
core été appelées dans l’île. Rien n’est prêt
« Le 22 janvier 1852, par dépêche ministé- pour les recevoir. Elles n’arriveront que le 9
rielle, 6 religieuses étaient demandées à juin.
Chartre pour être attachées au pénitencier
que le gouvernement allait établir en Guya- Il y a déjà dans une installation qui n’est
ne. Le 27 mai elles débarquaient de la Nou- pas brillante, cent cinquante malades.
velle Amélie à Cayenne. Sœur Symphoro- L’hôpital n’est encore qu’une baraque. Les
se était du nombre. sœurs sont aussi dans des baraques.
Sept jours auparavant, 3 Pères Jésuites et Le Gouverneur de la Guyane avait été en-
2 Frères coadjuteurs, partis de Brest sur la voyé à Cayenne pour organiser la Trans-
frégate La Forte étaient arrivés avec 30 portation. Une liberté sans limite lui avait
condamnés politiques, 240 forçats libérés, été laissé dans l’exercice du pouvoir. Il se
360 autres en cours de peines et pris dans révéla bientôt aussi peu intelligent dans sa
divers bagnes, en tout 630. La Forte mouil- conception d’une œuvre moralisatrice qu’in-
la au pied de l’Île Royale. capable de la réaliser. Ce fut le trouble
dans tous les services de la colonie. Dans le
C’est là que descendront et s’installeront les règlement, les officiers figurent partout, les
premiers transportés. Les îles ont été choi- Sœurs Hospitalières nulle part et depuis 5
sies pour le débarquement des transportés mois elles sont en fonction aux Îles du Sa-
parce que le mouillage est dur et abrité, et lut. Cet homme avait horreur de tout ce qui
aussi comme lieu d’acclimatation nécessai- s’approche de la religion.
re aux européens avant l’établissement à
l’intérieur de la Grand-Terre. Les religieuses ne recevaient que les rations
des transportés. Le Gouverneur ne reculait
C’est là en d’inextricables fouillis que les devant rien pour molester les Hospitaliè-
ouvriers devront se frayer un passage puis res ».
tracer un chemin qui conduira au sommet
de l’île. On l’a choisi pour l’assiette du C’est dans ce contexte que Marie Bargues
camp où l’on devra loger peut-être 1000 vécut les sept mois qu’elle passa aux Îles du
transportés. salut.