Page 35 - Adec-Bulletin 05-2006
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Bulletin de l’Association “Les Amis de Comiac” (ADEC)                                                      Numéro 5  - 2006 - Page 35


                                          LES TERRES PROMISES


                                              Par Jean-Claude GENRIES (1)



             Je me souviens de cet aïeul dont on ne par-       quoi sont-ils partis ?
             lait plus, la mémoire collective, familiale ou
             individuelle ayant cette faculté extraordinai-    La littérature et un peu de réflexion per-
             re d’occulter  ou de magnifier. Je savais qu’il   mettent d’en cerner les raisons, entre au-
             était du  lieu  dit  «  Les  Terres  »,  situé  à  500   tres : la misère, le partage des terres  (le
             mètres du bourg de Calviac et qu’il était par-    droit d’aînesse),  le  retour  des  guerres,  les
             ti  un  jour  «  aux  Amériques  »,  en  Argentine   calamités  agricoles  (le phylloxéra)… et  l’a-
             pensait-on. Il écrivait régulièrement une fois    venture ! Trois livres ont retenu mon at-
             l’an et puis un jour plus rien.                   tention:

             Je ne pouvais laisser cette histoire familiale    -  Les Barcelonnettes, le jardin de l’Al-
             non-explorée et j’avais pris la décision, il y a   meda,  de  Dugrand  et  Vallaeys.  Cet  ou-
             bien longtemps, d’aller sur ses traces.           vrage retrace l’histoire de ces petits agri-
                                                               culteurs des hautes vallées de l’Ubaye qui
             Cet hiver 2005, accompagné de Jean, un ami        pendant  les  six  mois  de  l’hiver  faisaient
             viticulteur de la région de Cahors, nous nous     les colporteurs de Vienne à Macon en pas-
             retrouvons sur un vol Madrid - Buenos Aires,      sant  par  Lyon  pour  compléter  le  maigre
             en  route  pour  l’aventure,  avec  un  petit  a…  revenu  de  la  ferme.  Vers  1820/1830,  ils
             rien  à  voir  avec  celle  de  Géraud Genries,   furent nombreux à tenter l’aventure vers
             dit  Sylvain…  avec  pour  seuls  éléments        le  Mexique,  en  partant  de  Bordeaux  en
             quelques  repères  biographiques  de  tradition   créant des sociétés commerciales et finan-
             orales et l’histoire de la colonie française de   cières.  (De retour au pays, après avoir réussi,
             Pigüé établie en 1884 par des familles rouer-     ils firent construire des maisons à l’architecture
             gates. Y avait-il un lien ?                       « exotique »)

             Revenons  à  Sylvain  Genries.  La  généalogie    -  Les Promesses du Ciel et de la Ter-
             de  cette  branche  familiale  retrouvée  (et tra-  re, de Claude Michelet, où le héros au re-
             vaillée par Yvette Aquioupou)  dans  les  archives   tour de la guerre de 1870 retrouve près de
             permet de le situer:                              Brive  la  ferme  familiale  à  l’abandon.
                                                               Après un détour par Lodève où il rejoint
             Fils  de  Jean  Genries  (d’Espalieu, commune  de   un soldat de rencontre, il se marie et les
             Calviac)  et  de  Marie  Montbertrand  (de Lissou-  deux  couples  partent  pour  Bordeaux  et
             lié, commune de Calviac), il épousa Marie Canet   atteignent après 75 jours de voyage San-
             (de Lissoulié, commune de Calviac) et  il est à l’o-  tiago du Chili, après une escale à Buenos
             rigine de la lignée des Genries qui s’ins-        Aires. A force de ténacité ils vont réussir
             tallèrent à Boussac, sur la commune de            en établissant un comptoir commercial et
             Comiac, où ils sont encore aujourd’hui.           en faisant colporteurs.

             Sylvain Genries fit construire la maison des      Les  Promesses  de  Pigüé,  de  Jean-
             Terres  vers  1870  et  la  vendit  quelques  an-  Michel Cosson, nous relate l’histoire d’un
             nées plus tard pour tenter la grande aventu-      jeune homme qui quitte la ferme familia-
             re.                                               le pour l’ Argentine. En effet en 1882, le
                                                               phylloxéra après avoir détruit le vignoble
             Pourquoi est-il parti ? Nul ne le sait ! Pour     français, ravage les hautes vallées du Lot,
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