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Bulletin de l’Association “Les Amis de Comiac” (ADEC) Numéro 5 - 2006 - Page 36
près d’Espalion. En parallèle, un enfant du tait leur premier voyage en bateau et ils
pays, Clément Cabanettes, 3 ème fils d’une savaient à peine où se situait le pays vers
grosse famille d’agriculteurs d’Ambec, près lequel ils naviguaient. Il faut imaginer
d’Espalion, parti comme instructeur mili- leurs craintes et leurs joies mêlées, cet en-
taire en 1879 à Buenos Aires et fondateur thousiasme de paysans vers leurs terres
des télécommunications argentines, achète promises...
des concessions agricoles avec l’intention
d’y installer ses compatriotes. Ses idées Quand l’avion se pose sur le tarmac de l’aé-
font leur chemin et en octobre 1884, 40 fa- roport international de Buenos Aires, je
milles (163 personnes de 1 à 46 ans) originaires suis pénétré de sentiments divers, espoir,
de St Geniez d’Olt, de St Félix et de Bo- curiosité, crainte. Nous passons quelques
zouls, embarquent à Bordeaux sur le navi- jours dans la capitale argentine qui se re-
re Le Belgrano. Après 38 jours de naviga- met lentement des soubresauts de l’histoire
tion, ils arrivent à Buenos Aires. Le 4 dé- (dictature militaire, banqueroute financière ré-
cembre 1884, ils fondent à Pigüé, à près de cente). Les européens et les français y sont
600 km au sud, une colonie agricole. particulièrement appréciés. La colonisation
de la ville se fit essentiellement par les ita-
liens et les espagnols, les français coloni-
sant les « nouvelles terres ».
Direction Pigüé (584 km - Pi-hué signifie lieu
de rencontre en langue indienne) Nous prenons
l’avion pour Bahia Blanca, l’aéroport le
plus proche de Pigüé, toutefois distant de
130 km. Nous sommes accueillis par mon-
sieur le Maire et son épouse de manière
fort sympathique, qui nous conduisent pen-
dant plus d’une heure à travers la pampa.
Sylvain Genries Vaste plaine herbeuse où ne paissent que
des vaches, à l’infini. Aucune ville ou villa-
Clément Cabanettes ge, seules une dizaines de fermes et au loin
une chaîne de montagne qui culmine à
est parti. Ils sont partis. Qu’importe les rai- 1015 m.
sons. Irlandais, italiens, espagnols, bas-
ques, barcelonnettes, rouergats ou autres,
ils avaient en commun le courage et l’es-
poir. Ils abandonnèrent leurs souvenirs,
quittèrent leur passé et leur pays pour al-
ler chercher fortune. Ils partaient avec un
aller simple. Ils partaient avec femmes et
enfants ou seul espérant faire venir leur
famille une fois installés. Ou encore céliba-
taires.
La magie de l’eldorado dont ils avaient en-
tendu parlé ou qu’on leur promettait : espa-
ces immenses avec l’assurance de posséder
50 à 100 hectares de terres si riches qu’el- Nous arrivons vers 20 heures à Pigüé et
les garantissaient deux récoltes par an. C’é- nous rejoignons la maison familiale